Comprendre les freins au covoiturage dans le Puy-de-Dôme en trois questions

Comprendre les freins au covoiturage dans le Puy-de-Dôme en trois questions

Comprendre les freins au covoiturage dans le Puy-de-Dôme en trois questions

Dans un contexte de hausse des prix des carburants, le quotidien La Montagne a proposé une série d’articles sur le regain du covoiturage. L’interview que Sébastien Reilles a accordée à Rémi Bayol, portait sur l’analyse des chiffres de l’Observatoire national du covoiturage.
Deux idées principales ont été relayées : 
– cet observatoire recense le covoiturage qui transite via des plateformes (Klaxit, Mov’ici…) et qu’il ne permet pas d’avoir une vision sur le covoiturage informel (covoiturage entre amis) ; 
– la dynamique de certains territoires est liée à un subventionnement des trajets en covoiturage, avec en général un effondrement des pratiques dès que les contributions publiques cessent.
Le nombre de Puydômois pratiquant le covoiturage augmente depuis le début de l’année. Pourtant, cette pratique peine à s’implanter durablement dans les pratiques quotidiennes. Explications.
Malgré le développement du covoiturage dans la métropole clermontoise, la pratique solitaire de la conduite y reste la norme.
Comment comprendre cela ?
Éléments de réponse avec Sébastien Reilles, chargé d’études mobilités à l’Agence d’urbanisme et de développement Clermont-Métropole.

D’après l’Observatoire national du covoiturage au quotidien, le covoiturage est peu développé dans le Puy-de-dôme. Comment expliquer cela ?

Les chiffres de l’Observatoire sont basés sur les données fournies par les plateformes, comme Klaxit, BlaBlaCar Daily, Karos. Donc, par exemple, deux amis qui se donnent rendez-vous pour se rendre à un concert au Zénith de Cournon d’Auvergne ne sont pas comptabilisés. Le ministère des Transports estime que l’observatoire recense entre 15 et 20 % des trajets en covoiturage sur tout le territoire. Cela étant dit, Clermont et le Puy-de-dôme ne sont en effet pas les territoires où il y a le plus de preuves de covoiturage. Cela s’explique par une multitude de facteurs. Tout d’abord, le fait que certains axes – comme Vichy/Clermont – sont bien desservis par les trains. Pour les axes moins bien reliés, les collectivités, les entreprises locales et les plateformes de covoiturages n’incitent pas encore assez les usagers.

La Métropole expérimente en ce moment le covoiturage gratuit. Cela peut-il permettre d’inciter les automobilistes ?

Ces solutions ont été testées à Rouen et en Île-de-France avec de bons résultats. Le problème est que ça marche tant qu’on subventionne. Le jour où la Région Île-de-France a arrêté d’offrir les trajets, le trafic de covoiturage s’est écroulé de 95 %. De plus, il ne faut pas que ça pousse des gens à covoiturer pour faire de petits trajets qui peuvent être effectués à vélo ou en transport en commun.

Comment généraliser l’autopartage dans le département ?

Il faut sensibiliser les entreprises et les employés à cette question. En France, entre 75 et 80 % de l’accès au travail se fait en voiture. Les incitations financières mises en place par l’État depuis quelques années sont également importantes. La hausse du prix de l’essence et l’apaisement de la situation sanitaire ont stimulé le covoiturage. Mais si la vague de Covid-19 se confirme, je ne sais pas si la dynamique va perdurer.

Le covoiturage : quelles perspectives suite à la crise sanitaire et à l’augmentation des prix des carburants ?

Le covoiturage : quelles perspectives suite à la crise sanitaire et à l’augmentation des prix des carburants ?

Le covoiturage : quelles perspectives suite à la crise sanitaire et à l’augmentation des prix des carburants ?

Retour sur les échanges du club Mobilités de la FNAU[1]

 

Dans l’article L3132-1 du code des transports, le covoiturage est défini « comme l’utilisation en commun d’un véhicule terrestre à moteur par un conducteur et un ou plusieurs passagers, effectuée à titre non onéreux, excepté le partage des frais, dans le cadre d’un déplacement que le conducteur effectue pour son propre compte. Leur mise en relation, à cette fin, peut être effectuée à titre onéreux ».

Au regard d’enjeux de congestion, d’environnement ou encore de pouvoir d’achat, les politiques de mobilité, qu’elles soient en milieu urbain ou en zone rurale accordent une grande importance au développement du covoiturage. Localement, de nombreux acteurs (Covoiturage Auvergne, Département du Puy-de-Dôme, Riom Limagne Volcans…) s’intéressent à cette solution en développant des aires de covoiturage, des partenariats avec des opérateurs, des aides dans l’animation… De plus, le Pôle métropolitain Clermont Vichy Auvergne s’est intéressé aussi à ce sujet, en 2019, au travers d’une conférence et d’enquêtes sur les aires de covoiturage.

Le covoiturage, une solution de mobilité avec « les sièges vides »

La plupart des voitures circulent avec leur seul conducteur à bord. En 2012, une enquête locale sur les pratiques de déplacements [2] avait indiqué que le taux moyen d’occupation était de 1,36 personne par voiture. Exprimé plus simplement, cela signifie que sur 100 voitures, 64 circulent avec 1 seule personne et que les 36 restantes ont 2 personnes à bord. Comme ailleurs, ce taux d’occupation est plus faible pour accéder au travail, alors qu’il est plus élevé pour les déplacements familiaux ou de loisirs, du fait de l’accompagnement des enfants.

Vinci Autoroutes a mis en évidence à l’automne 2021 sur une quinzaine d’autoroutes en approche des grandes métropoles de province (Bordeaux, Lyon, Nantes, Nice, Toulouse…) que 83% des véhicules sont occupés par le seul conducteur. C’est aux environs de 8h (là où le trafic est le plus dense) que cette part d’autosolisme est la plus forte (89%). En effet, les travailleurs utilisent très majoritairement la voiture (75 – 80%) pour se rendre au travail et très souvent seul (taux d’occupation inférieur à 1,1 personne par voiture).

Pour la collectivité, encourager le covoiturage pour se rendre au travail est un levier considérable pour réduire la congestion et la pollution des villes. Mais, le covoiturage confère un autre atout : permettre à une personne non motorisée (en zone périurbaine 5 à 10% des ménages n’ont pas de voiture) de profiter d’une voiture conduite par un autre.

Une pratique insuffisamment mesurée et dépendant de subventions versées par la collectivité

La Loi d’Orientation des Mobilités (décembre 2019) vise à encourager les transports les plus propres pour les trajets domicile – travail. A ce titre, elle a instauré le dispositif (facultatif) de « forfait mobilités durables », qui permet à un salarié de recevoir jusqu’à 600 € par an s’il utilise un vélo, pratique le covoiturage en tant que conducteur ou passager ou encore loue un engin de déplacement personnel (trottinette, scooter électrique…).

Dans ce cadre, l’État a développé, en lien avec les opérateurs partenaires (Blabacar daily, Karos, Klaxit, Mov’ici, Rezo Pouce…) le dispositif de preuves de covoiturage. Via l’observatoire national du covoiturage au quotidien, des données objectives permettent de commencer à suivre cette pratique, même si la majorité des flux échappent aux plateformes de covoiturage. En effet, le Ministère des transports estime à 80 – 85% les flux qui sont réalisés en covoiturage dans des cadres informels (famille, amis, collègues).

Les déplacements du quotidien en covoiturage [3] via les plateformes partenaires concernent au plus 500 000 déplacements par mois en France. La dynamique sur ce mode de déplacement a été fortement enrayée par la crise sanitaire. Depuis mars 2022, la baisse des cas de Covid-19 et l’envolée des prix des carburants, le covoiturage connait un boom, mais ne retrouve pas (encore ?) les volumétries observées en janvier / février 2020.

Des services de mobilité active, pour une mobilité de proximité

Sur un plan géographique, le covoiturage est plus fortement pratiqué dans la vallée de la Seine, dans la zone Isère / Savoie / Suisse et en Bretagne / Pays-de-la-Loire. Aux environs de Clermont-Ferrand, sa pratique est modeste.

Flux de passagers transportés [4] en covoiturage en mai 2022
(bassin de Clermont-Ferrand / France entière)

Tableau de bord du covoiturage en mai 2022
(Clermont Auvergne Métropole / France entière)

Les différences entre territoire s’expliquent moins par des questions de densité de population, de qualité des réseaux routiers, de performances des transports publics… que par les dispositifs de subventionnement accordés par certaines collectivités.

En effet, la Loi d’Orientation des Mobilités permet aux collectivités locales de subventionner les trajets en covoiturage quotidien. Cette subvention est encadrée et ne peut excéder les frais de déplacement engagés par le conducteur. A titre d’exemple, la Métropole Rouen Normandie verse au conducteur un forfait de 2 € pour un trajet de moins de 20 km et par passager et un forfait de 2 € plus 10 cents par kilomètre et par passager pour un trajet compris entre 20 et 40 km, plafonné à 4 €. En outre, le trajet est gratuit pour les personnes covoiturées.

Ce type de dispositif a été récemment adopté à Clermont-Ferrand par le Syndicat Mixte des Transports en Commun (SMTC), dans le cadre d’un partenariat avec l’application de covoiturage Klaxit.

Source : SMTC

Une pratique mesurée encore très modeste par rapport aux flux généraux

Plusieurs initiatives, mises en avant comme des succès dans le monde du covoiturage, sont néanmoins modestes par rapport à l’intensité des flux sur un axe ou un périmètre considéré.

Grâce au subventionnement des trajets en covoiturage, 1 200 déplacements par mois sont réalisés au sein d’Angers Loire Métropole. De l’autre côté de la France, la ligne de covoiturage dynamique « Lane » entre Bourgoin-Jallieu et Lyon (autoroute A 43), est considéré comme un des rares exemples de lignes dynamiques (le passager se présente à l’arrêt de covoiturage, appui sur un bouton, informe des voitures de son intention de voyager et dans un délai de 5 à 10 minutes le passager trouve une voiture) ayant connu un succès… avec 90 passagers transportés par jour. En outre, comme cela avait été montré par l’enquête clermontoise, les aires peuvent être utilisées à d’autres fins que le covoiturage (pause sur la route, vente d’une voiture…).

Le covoiturage : une pratique à accompagner par une approche systémique permettant de réduire les réticences 

Si le fait de covoiturer est une possibilité connue de tous pour se déplacer, il n’en demeure pas moins que de nombreux freins subsistent pour passer à l’acte :

  • – Les impacts liés au covoiturage (faire un petit détour, caler des horaires de RDV…) par rapport à son organisation quotidienne.
  • – La perte d’autonomie dans sa mobilité : devoir dépendre d’autrui.
  • – La crainte de ne pas avoir de solutions alternatives, dans le cas d’un imprévu (ex : enfant malade en cours de journée).
  • – Le manque de confiance envers des personnes non connues.
  • – Les craintes autour du respect de la vie privée (être « tracé » dans ses faits et gestes).
  • – Des bénéfices financiers jugés faibles au regard des contraintes.

Ainsi, par un meilleur dialogue et une meilleure coordination de leurs actions, les acteurs du covoiturage (Autorités Organisatrices des Mobilités, gestionnaires de voiries, associations et sociétés développant des solutions de covoiturage, employeurs, acteurs de l’insertion…) sont en capacité à développer des actions permettant d’atténuer ces freins.

Si, au départ, le covoiturage s’est développé grâce à l’aménagement d’aires de covoiturage et au développement de plateformes de réservation, il apparaît aujourd’hui nécessaire de travailler d’une part sur l’animation / la communication et d’autre part sur des solutions complémentaires permettant au conducteur / au passager d’avoir une plus grande souplesse.

Pour conclure, il ressort que le développement tout azimut du covoiturage est d’une part une mesure pertinente pour aller vers une mobilité moins carbonée et d’autre part elle est pragmatique dans la mesure où les déplacements en voiture restent les plus nombreux. Ainsi, une politique globale de mobilité ne peut qu’inclure cette pratique dans son champs d’actions.

[1] Le club mobilités de la FNAU du 17 juin 2022 a permis une journée d’échange sur ce thème entre une vingtaine d’Agences et des experts du Ministère de Transition écologique, du Cerema et de Vinci Autoroutes.

[2] Enquête Déplacements Grand Territoire Clermont Val d’Allier de 2012, portée par le SMTC de Clermont-Ferrand, sur un territoire de 343 communes.

[3] Déplacements jusqu’à 80 km. Ceci exclu le covoiturage longue distance, qui connaît un franc succès, via l’application Blablacar.

[4] Selon le Registre de Preuve de Covoiturage

Les mobilités dans les zones peu denses – Quels leviers pour l’action ?

Les mobilités dans les zones peu denses – Quels leviers pour l’action ?

Les mobilités dans les zones peu denses – Quels leviers pour l’action ?

Historiquement, l’organisation des politiques publiques de mobilité avait lieu sur les seules zones agglomérées et concernait le déploiement d’un service de transport collectif urbain. Mais plusieurs évolutions législatives (Loi Nouvelle Organisation Territoriale de la République – NOTRé en 2015, Loi d’Orientation des Mobilités en 2019…) ont conduit à exercer celle-ci sur des territoires de plus en plus étendus et en diversifiant le champ des compétences de la seule organisation des transports collectifs à celle d’un bouquet de mobilités incluant transports publics réguliers, transports à la demande, mobilités actives, mobilités partagées, mobilités solidaires, services de transports de marchandises…

A la faveur de la Loi d’Orientation des Mobilités du 24 décembre 2019, la compétence Mobilité est depuis juillet dernier, exercée sur l’ensemble du territoire national, soit par :

  • Les autorités organisatrices préexistantes – en bleu sur la carte ci-dessous (principalement des communautés d’agglomération) ;
  • Les communautés de communes ayant pris la compétence mobilité – en vert sur la carte ci-dessous ;
  • Les régions pour les communautés de communes qui ont souhaité déléguer cette compétence à la Région – en jaune sur la carte ci-dessous.

Illustration réalisée par le Cerema

Au-delà de cette question du statut juridique de l’Autorité Organisatrice des Mobilités, il ressort que les territoires couverts sont extrêmement divers et que les réponses développées historiquement par les Autorités Organisatrices des Mobilités (déploiement d’un réseau régulier de bus dans les zones agglomérées) ne peuvent constituer la réponse unique à la fois au regard de critères d’efficacité / de fluidité des mobilités comme de critères financiers.

Dès lors, le défi pour ces autorités consiste à proposer de nouvelles solutions de mobilité pour les zones peu denses, principalement à destination des personnes non motorisées (jeunes, séniors, personnes en situation de handicap…) et en s’appuyant sur le champ d’intervention défini par le législateur.

Illustration réalisée par l’Agence d’Urbanisme et de Développement Clermont Métropole

Plusieurs travaux récents, portés par des structures [1] conseillant les collectivités locales relaient des projets exemplaires, qui peuvent être des sources inspirantes pour une collectivité qui cherche à déployer ou étoffer ses services de mobilité dans les zones peu denses.

Des services de transports publics réguliers, scolaires ou à la demande, socle de l’offre de mobilité

Il convient de distinguer :

  • – Un service régulier qui a pour caractéristiques principales de circuler sur un itinéraire fixe, suivant des horaires de passages prédéfinis et assurant une prise en charge ou une dépose des passagers (tout public) à des arrêts préalablement définis.
  • – Le service scolaire qui répond aux mêmes critères, sauf qu’ils sont organisés pour assurer à titre principal et à l’intention des élèves la desserte des établissements d’enseignement.
  • – Le transport à la demande qui est un mode de transport en commun dont les trajets et les points de desserte sont déterminés en fonction de la demande des usagers.

Le choix d’assurer tel ou tel type de services de transport dépend notamment du volume de passagers escomptés ou encore de leur typologie (jeunes, salariés, séniors).

Quel que soit le type de service, ces offres constituent pour bon nombre d’Autorités Organisatrice des Mobilités le socle de l’offre de service, car elle est dans bien des cas :

  •  – Le premier service de mobilité développé sur un territoire (les villes de Riom ou Thiers disposent de bus urbains depuis les années 1970 / 1980, Plaine Limagne est entré dans les services de mobilité en 2019, via le transport à la demande…) ;
  • – Le service de mobilité qui assure le plus grand nombre de trajets réalisés.

Si ces services sont éprouvés, des évolutions sont en cours de développement, qui peuvent contribuer à étendre leur influence dans les zones peu denses. D’une part, il s’agit d’une plus grande articulation entre un réseau de transport public et les vélos. Depuis le 1er juillet 2021, les autocars neufs utilisés pour les services réguliers de transports publics non urbains doivent être équipés pour transporter au moins 5 vélos. Si cette obligation concerne les services organisés par la Région, il n’en demeure pas moins qu’une Autorité Organisatrices des Mobilités peut déployer une stratégie d’articulation entre son réseau et le vélo, soit par l’aménagement de box sécurisés à proximité d’arrêts, soit par des stations de vélo en libre-service ou encore en autorisant l’emport de vélo dans les bus urbains. D’autre part, le développement des navettes autonomes, qui reste encore expérimental, apparaît comme une technologie prometteuse pour assurer des services de mobilité dans les zones peu denses.

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Les services de transport régulier urbain en zones peu denses (fiche « la boîte à outils » du Cerema)
Ce document apporte un éclairage général sur le transport régulier urbain au travers de la définition du service, des objectifs assignés à cette offre, d’ordres de grandeur sur les usages, les coûts d’exploitation, le matériel roulant ou les effectifs ou encore des éléments juridiques pour mettre en place un tel service. Deux exemples sont cités : la communauté de communes de Decazeville communauté – 19 000 hab. / 12 communes – qui a déployé 2 lignes régulières desservant 5 communes et la communauté de communes du Pays de Saverne – 36 000 hab. / 35 communes – qui a mis en service une navette de centre-ville à Saverne.

Intermodalité vélo autocar en Région Auvergne-Rhône-Alpes (fiche issue de la publication DREAL / Cerema / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 2 »)
Cette fiche vise à faire connaître le dispositif autocar + vélo qui offre de nouvelles opportunités pour les mobilités de loisirs ou pour la découverte touristique. Sur les lignes citées en exemple dans le secteur Ardèche / Loire / Haute-Loire, la possibilité d’emporter le vélo dans l’autocar a contribué à une dynamique de fréquentation des lignes concernées. Ce dispositif est amené à s’étendre puisque, depuis le 1er juillet 2021, les autocars neufs utilisés pour des services réguliers de transport public non urbain doivent être équipés d’équipements permettant le transport de 5 vélos.

–  Navette autonome « Beti » (fiche issue de la publication DREAL / Cerema / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 2 »)
Cette fiche présente un service de navette autonome [2] en zone peu dense. Elle assure à titre expérimental une liaison entre la gare SNCF de Crest (9 000 hab.) et une zone d’activités, située à 5 km de la gare. Cette expérience est un démonstrateur des possibles complémentarités entre un réseau régulier (gare, station de bus…) et des générateurs de mobilité pour lesquels une desserte classique par les transports collectifs n’a que peu de sens au regard de la fréquentation escomptés et des coûts.

Des services de mobilité active, pour une mobilité de proximité

Les mobilités actives désignent tous modes de déplacements nécessitant une activité humaine. Cela concerne principalement la marche (qui assure 24% de la mobilité du quotidien) et le vélo (qui assure 2.7% de la mobilité du quotidien).

Le rôle des Autorités Organisatrices des Mobilités est de définir une politique en faveur des mobilités actives, la planifier, la piloter et mettre en place des dispositifs facilitant leur recours, car elles constituent des alternatives à la voiture pour effectuer les déplacements courts. Toutefois, si la compétence mobilité permet de définir un « plan vélo » ou un « plan piéton », planifiant un certain nombre d’aménagements sur des axes routiers, la réalisation des travaux relève de la compétence voirie, qui est assurée principalement par les communes et par les départements.

Ces dernières années, les Autorités Organisatrices des Mobilités ont principalement accompagné le développement du vélo en travaillant sur 3 axes :

  • – La définition d’un « plan vélo » qui visent à définir à horizon moyen / long terme les aménagements cyclables projetés (réalisés par les services des communes ou du département), les politiques de stationnement, d’apprentissage ou encore de la communication autour de la bicyclette. Curieusement très peu de collectivités ont décliné ce type de plan pour encourager la marche à pied, qui pourtant assure dix fois plus de déplacements que le vélo.
  • – Le développement de système de location de vélos, généralement pour de la longue durée, car le modèle « Vélib’ » n’est pertinent que dans les zones densément peuplées.
  • – L’aide à l’achat de vélo (généralement orienté vers les vélos électriques).

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– Les services de vélo en location longue durée (fiche « la boîte à outils » du Cerema)
Ce document apporte un éclairage général sur les services de location de vélo en longue durée en précisant les objectifs recherchés (accès à une solution de mobilité pour certains, moindre usage de la 2ème voiture pour d’autres), le dimensionnement et les coûts du service ou encore le montage juridique pour déployer cette offre. Deux exemples sont mis en avant : le Gal Sud Mayenne, qui a développé un service de location de vélos électriques sur 3 communautés de communes (75 000 hab. / 84 communes) et le Pays de Beaume Drobie (cf. ci-dessous)

– Zoom sur les mobilités actives (fiche du ministère chargé des transports)
Ce feuillet présente la palette d’actions qu’une Autorité Organisatrice des Mobilités peut engager pour organiser des services de mobilité active (prime à l’achat de vélos, mise en place d’un système de location de vélos, soutien aux ateliers de réparation de vélos…) et précise que les pistes ou bandes cyclables relèvent de la compétence voirie (donc de la commune ou du département) et que le stationnement relève de la police de la circulation (donc du maire).

– Aide à l’achat de vélos à assistance électrique (fiche issue de la publication DREAL / Ademe / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 1)
Cette fiche présente un exemple de prime à l’achat de vélos à assistance électrique, porté par la communauté d’agglomération du Pays Voironnais (94 000 hab. / 31 communes). L’originalité de la démarche porte sur l’accompagnement des personnes aidées, pour cerner via des dispositifs d’enquête et d’atelier d’échanges les changements de mobilité escomptés et la réalité des usages.

Service de location de vélos en territoire peu dense (fiche issue de la publication DREAL / Cerema / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 2) 
Cette fiche présente le système de location de vélo à assistance électrique longue durée (de 1 à 6 mois), déployée par la communauté de communes du Pays de Beaume Drobie (9 000 hab. / 19 communes). Cette action démontre qu’il est également possible en zone rurale de porter des politiques incitatives en faveur de l’éco-mobilité.

Développement du vélo sur le PNR Livradois-Forez (fiche issue de la publication DREAL / Cerema / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 2)
Cette fiche présente l’engagement d’un Parc Naturel Régional dans la politique vélo en étant maître d’ouvrage d’un plan vélo en association avec les communautés de communes d’Ambert Livradois Forez (28 000 hab. / 58 communes) et Thiers Dore et Montagne (37 000 hab. / 30 communes).

Des services de mobilité partagée, pour optimiser les usages de la voiture

Au regard des constats que les voitures roulent principalement avec le seul conducteur et que les voitures sont en stationnement plus de 95% de leur durée de vie, de nouveaux usages de la voiture au travers du covoiturage et de l’autopartage se développent. Ces solutions apparaissent comme pragmatiques, mêlant acteurs publics (organisation) et acteurs privés (pour le transport à proprement parlé) et bien adaptés aux défis de mobilité des zones peu denses.

En termes de covoiturage (se regrouper à plusieurs pour n’utiliser qu’un véhicule), l’action de l’Autorité Organisatrice des Mobilités porte sur l’éventail des dispositifs facilitant cette pratique (schéma des aires de covoiturage, accompagnement financier d’une plate-forme locale de mise en relation, allocations financières aux conducteurs…) sans pour autant organiser le service (les véhicules assurant les trajets relèvent de la sphère privée). Au regard de la moindre densité de circulation, en zones peu denses, le principal défi est de mettre en relation des personnes qui effectuent le même trajet à la même heure. Il convient avant tout de disposer d’une bonne connaissance des flux, avant de dimensionner tout équipement facilitant l’usage de cette pratique (aire de covoiturage, opportunité d’un système de covoiturage dynamique).

En termes d’autopartage (partager à plusieurs l’utilisation d’un véhicule sur des plages horaires différentes) l’action de l’Autorité Organisatrice des Mobilités est très variable suivant le service. Elle peut aller de la simple autorisation d’occupation temporaire du domaine public à une participation financière au modèle économique d’un opérateur privé (subvention), à piloter un marché public / une délégation de service public pour retenir un opérateur répondant au cahier des charges de la collectivité ou encore à accompagner les initiatives entre particuliers.

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Autopartage en zone rurale – communauté d’agglomération Privas centre Ardèche (fiche Mobilité d’Auvergne-Rhône-Alpes Energie Environnement)
Le projet porté par la communauté d’agglomération Privas centre Ardèche (44 000 hab. / 42 communes) a pour but de mettre à disposition sur l’espace public une flotte de véhicules électriques en autopartage afin de faciliter l’accès à la voiture pour les personnes qui n’en disposent pas, mais aussi d’inciter les familles qui en disposent de deux ou plus à en abandonner une.

L’autopartage en zones peu denses (fiche « la boîte à outils » du Cerema)
Ce document apporte tout d’abord un éclairage général sur les services d’autopartage et précise qu’en territoires peu denses, les collectivités optent majoritairement pour des systèmes d’autopartage en boucle (prise et dépose du véhicule se fait au même endroit). Ce feuillet apporte des éléments sur les coûts (acquisition voitures et exploitation du système), les effectifs ou encore des éléments juridiques et administratifs pour mettre en place ce service. Trois collectivités (entre 30 000 et 75 000 hab.) sont citées pour leur déploiement d’un service d’autopartage (acquisition de 1 à 5 voitures).

Zoom sur l’autopartage (fiche du ministère chargé des transports)
Ce feuillet présente tout d’abord le concept d’autopartage puis développe les différentes manières pour l’Autorité Organisatrice des Mobilités de s’investir dans ce service, qui va de l’autorisation d’occupation de l’espace public formulée par un opérateur privé au portage d’un système d’autopartage en passant par de l’incitation auprès des entreprises pour mutualiser des véhicules. Parmi les solutions mises en avant, il est cité le service d’autopartage entre particuliers proposé par le SMTC de l’agglomération clermontoise en lien avec l’association Covoiturage Auvergne. Même si ce projet est à l’échelle d’une grande agglomération, il peut se déployer également en zones peu denses.

Zoom sur le covoiturage (fiche du ministère chargé des transports)
Ce document présente l’éventail des actions que peut porter une Autorité Organisatrice des Mobilités pour inciter à cette pratique. Son action passe principalement par un soutien technique et / ou financier aux collectivités en charge de la voirie (pour les aires de covoiturage), à des acteurs associatifs ou privés qui incitent à cette pratique ou encore en versant une incitation financière aux covoitureurs.

Autopartage en milieu rural (fiche issue de la publication DREAL / Ademe / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 1)
Par son caractère rural et montagnard, le département de l’Ardèche dispose de peu de services de transport collectif (seul département sans desserte ferroviaire) et les personnes qui ne sont pas propriétaires d’une voiture ne peuvent se déplacer facilement. Pour lutter contre l’isolement social, plusieurs initiatives d’autopartage ont été développées dans ce département : autopartage intergénérationnel entre particuliers sur le plateau de Vernoux ou encore un service d’autopartage de voitures électriques dans les centralités d’Annonay, Aubenas et Privas.

Covoiturage dynamique Covoit’ici (fiche issue de la publication DREAL / Ademe / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 1)
A l’initiative du Parc Naturel Régional des Volcans d’Auvergne et du SMTC de l’agglomération clermontoise une expérimentation d’une ligne de covoiturage dynamique sur une route départementale à fort trafic a été menée de mai 2019 à aout 2021 dans la périphérie ouest de Clermont-Ferrand. Cette initiative a été fortement impactée par la crise COVID et n’a pas eu le succès escompté. Toutefois, des enseignements sont à rechercher dans cette expérience pour déployer ce type de service dans d’autres territoires.

Des services de mobilité solidaire, pour garantir une mobilité partout et pour tous

Les mobilités solidaires visent à apporter des réponses aux publics en situation de handicap ou de vulnérabilité économique ou sociale. Cette compétence entend développer les coopérations avec les acteurs de la sphère sociale, de l’insertion et de l’emploi. Au-delà de l’évolution des offres existantes pour les rendre plus inclusives et accessibles (tarification sociale des services de transports, accessibilité PMR à bord des bus ou navettes…), ce volet vise à développer :

  • – Des solutions de mobilités spécifiques à certains publics. Il s’agit en général de services spécifiques au regard de conditions de ressources ou d’une typologie de handicap. Certains services s’appuient sur un partenariat avec des taxis conventionnés (transport social de la communauté de communes des Monts du Lyonnais), d’autres font appel à des bénévoles (dispositif Covoit’Santé de la communauté de communes du Pays de St-Eloy).
  • – A accompagner des personnes vers l’apprentissage à la mobilité (vélo-école, auto-école, …) ou vers des aides à la mobilité (chèque pour aider aux déplacements, prêt de vélo ou de voiture…). Les actions menées par les plateformes de mobilités apportent des solutions globales pour ces personnes en difficulté.

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Le transport social par la communauté de communes des Monts du Lyonnais (fiche Mobilité d’Auvergne-Rhône-Alpes Energie Environnement)
Au regard des difficultés à se déplacer pour des publics précaires, la communauté de communes des Monts du Lyonnais a développé un service de transport social, à destination de ces personnes, selon des critères précis (âge, revenu, handicap…). Suite à la signature d’un marché public avec des taxis, ces personnes peuvent faire appel à ce service pour leurs déplacements, moyennant l’achat d’un ticket à 2€ / trajet.

Le transport d’utilité sociale s’appuyant sur les véhicules de bénévoles (fiche « la boîte à outils » du Cerema)
Ce document apporte un éclairage général sur la définition d’un transport d’utilité sociale, les coûts et les moyens à mettre en place par la collectivité et des conseils sur le recrutement de conducteurs bénévoles. Puis, il est mis en avant le projet développé par deux communautés de communes de Meurthe-et-Moselle (Pays de Colombey 11 000 hab. / 38 communes ; Pays du Saintois 14 000 hab. / 55 communes). Celui-ci permet à des familles en grande précarité d’effectuer jusqu’à 5 déplacements par mois, principalement pour des rendez-vous médicaux et des courses, grâce à un réseau de conducteurs bénévoles (défrayés par la collectivité au regard des kilomètres parcourus).

Zoom sur les mobilités solidaires (fiche du ministère chargé des transports)
Ce feuillet indique que sous l’impulsion de la Loi d’Orientation des Mobilités, la collectivité doit veiller au droit à la mobilité, notamment pour les personnes en situation de précarité financière ou de handicap. Pour parvenir à cet objectif, il est nécessaire de favoriser les coopérations entre les acteurs de la mobilité, du social, de l’insertion et de l’emploi. Les services qui peuvent être développés ou accompagnés par l’Autorité Organisatrice des Mobilités peuvent être de nature très différentes : organisation d’un transport à la demande, participation à une plateforme de mobilité, implication dans un garage solidaire, aides à la personne via un chèque mobilité ou via des aides à l’obtention du permis de conduire…

Covoit’santé (fiche issue de la publication DREAL / Ademe / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 1)
La communauté de communes du Pays de St-Eloy (17 000 hab. / 34 communes) a mis en place un système de mobilité solidaire, afin que les personnes les plus précaires arrêtent de renoncer à se faire soigner, du fait de difficultés à se déplacer (pas de transport collectif adapté, pas de voiture, pas de permis). Pour répondre à ce défi, les acteurs locaux ont développé le système Covoit’santé qui repose sur un volant de bénévoles, qui amène des personnes à leurs rendez-vous médicaux.

Chèques Mobiplus (fiche issue de la publication DREAL / Ademe / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 1)
Il s’agit d’une aide à la mobilité destinée à des publics précaires (personnes âgées sans voiture, jeunes accompagnés par les missions locales…). Ils reçoivent deux fois par an un chéquier avec 20 bons de 3€ permettant de payer différents moyens de transport : taxi, transports collectifs, location d’un deux-roues…

Plateforme mobilité 63 (fiche issue de la publication DREAL / Cerema / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 2)
La plate-forme mobilité 63 apporte des solutions de mobilité aux personnes les plus empêchées de se déplacer en proposant un accompagnement individuel pour « savoir bouger » (apprendre à se déplacer en transport collectif, vélo école, formation au permis de conduire) et pour « pouvoir bouger » (location de deux-roues, location de voiture, entretien de la voiture par un garage solidaire).

Autoécole sociale Tremplin (fiche issue de la publication DREAL / Cerema / Urba4 « les mobilités innovantes – tome 2)
En zone rurale, l’obtention du permis de conduire facilite grandement les possibilités de déplacements. Néanmoins, pour des personnes isolées et fragiles économiquement, il n’est pas possible de se rendre par leur propre moyen à une auto-école et de financer le permis. C’est pour répondre à ce double défi qu’est née l’auto-école solidaire et itinérante du groupe Tremplin. Elle dispense des cours de code et de conduite dans des villages isolées et propose des tarifs adaptés aux situations sociales des personnes.

Pour conclure, la Loi d’Orientation des Mobilités a donné un nouveau cap dans l’organisation des mobilités et particulièrement dans les zones peu denses, qui jusqu’à peu étaient des zones blanches de tout service de mobilité et qui à présent font l’objet de nouvelles modalités de dessertes, pour sortir du « tout voiture ».

En zones peu denses, les Autorités Organisatrices des Mobilités se sont emparées, ici ou là, de la plupart des champs d’intervention définis par la Loi d’Orientation des Mobilités. Des solutions existent et sont sources d’inspiration. Elles sont à solliciter en fonction des objectifs assignés par chaque collectivité et au regard des enjeux territoriaux et sociaux de la zone à desservir. Les outils à actionner peuvent être différents et complémentaires.

Toutefois, au sein de cette boite à outil, les services de conseil en mobilité et les services de transport de marchandises semblent à ce jour n’être pleinement développés que dans les zones agglomérées.

[1] On peut citer entre autres : Auvergne-Rhône-Alpes Energie Environnement, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), le Ministère chargé des transports ou encore le réseau Urba4 des agences d’urbanisme d’Auvergne-Rhône-Alpes…

[2] La navette autonome est un véhicule de transport collectif d’une quinzaine de places, dont la conduite est entièrement automatisée (sans conducteur). Ces services, pour l’instant, expérimentaux visent à faciliter les rabattements vers des lignes plus structurantes (train, tramway, métro…).

Les mobilités innovantes en Auvergne-Rhône-Alpes

Les mobilités innovantes en Auvergne-Rhône-Alpes

Les mobilités innovantes en Auvergne-Rhône-Alpes

Synthèse d’un ouvrage [1] co-réalisé par le réseau Urba4 comportant une série de fiches monographiques pour développer des mobilités inclusives, faciles et sobres

La parution, en juin 2022, du tome 2 de la publication sur les mobilités innovantes en Auvergne-Rhône-Alpes est le fruit d’une collaboration entre plusieurs organismes œuvrant dans le domaine des mobilités [2]. Cette publication a été motivée par les bouleversements, qui ont concerné les mobilités des personnes et des marchandises dans la période récente.

En effet, la Loi d’Orientation des Mobilités (24 décembre 2019) a donné un nouvel élan aux politiques de déplacements, au travers de 6 défis portant sur des mobilités plus connectées, plus intermodales, plus soutenables, plus sûres, plus solidaires et plus propres. En outre, les crises sanitaires, écologiques et énergétiques traversées ces deux dernières années vont impacter nos visions sur les modèles de mobilité à promouvoir et rendre l’action plus complexe. En effet, si le développement des mobilités partagées (covoiturage, transports collectifs) est toujours recherché, la crise du COVID-19 a mis en évidence la fragilité de ces actions au regard de la santé publique. De même la crise énergétique, conséquence du conflit en Ukraine, nous impose à aller plus vite en termes de sobriété et à développer des filières d’approvisionnement dépendant moins des importations.

Au final, il nous apparaît que l’innovation dans les mobilités est à raccrocher à trois grands enjeux pour les mobilités de demain : le droit à la mobilité pour tous, la facilité à utiliser les différentes offres et la sobriété énergétique des véhicules.

Garantir le droit à la mobilité :

Les spécialisations territoriales des dernières décennies ont conduit à un éloignement croissant des lieux de résidence et d’activités (travail mais aussi lieux d’études, de commerces ou de loisirs). Dans cette évolution urbaine, qui conduit à une multiplication des déplacements et du nombre de kilomètres, l’automobile s’est taillée la part du lion en assurant la majorité des déplacements : au plan national, la voiture est utilisée pour 2 déplacements de proximité sur 3.

Or, pour des raisons multiples (droit à la mobilité pour tous, santé publique, dépendances énergétiques, cadre de vie et attractivité…), il convient de repenser le modèle actuel et de promouvoir partout des modes alternatifs crédibles et adaptés. D’ailleurs, la couverture de l’ensemble du territoire par une Autorité Organisatrice des Mobilités, chargée d’organiser les services locaux de mobilités est une des mesures phares de la Loi d’Orientation des Mobilités.

Certes, si dans les zones de centralités, les alternatives au tout voiture se développent fortement depuis plus de 20 ans avec l’avènement des tramways, le retour du vélo ou encore le développement de nouveaux services allant de la trottinette électrique à l’autopartage, les outils restent largement à inventer dans les zones périurbaines et rurales, pour permettre à tous de pouvoir se déplacer autrement qu’en voiture. Le présent recueil expose plusieurs projets apportant des réponses à cette « fracture » territoriale et sociale dans le domaine des mobilités.

Ainsi, le calculateur E-Mob est un outil d’information qui s’adresse aux familles en quête d’un logement et éclaire leur projet en prenant en compte les conséquences en termes de budget de déplacements, à s’éloigner des lieux d’activités fréquentés par le ménage. L’éloignement nécessite d’avoir plus souvent recours à la voiture et sur des distances quotidiennes de plusieurs dizaines de kilomètres, générant des frais, du stress et des atteintes à l’environnement.

Mais, l’essentiel des mesures pour garantir à tous de pouvoir se déplacer porte sur le développement de solutions de mobilité sur les territoires qui en sont aujourd’hui dépourvus. La démarche OrbiMob’ vise à développer des « mobilités territoriales durables » dans le bassin clermontois. Il s’agit certes d’accélérer les transformations en cours dans la zone agglomérée (tramway, vélo…), mais aussi à trouver des réponses pour les secteurs périurbains et ruraux adjacents.

Certains territoires, mis en avant dans cette publication, montrent que des solutions existent pour les territoires peu denses, notamment dans le domaine du vélo (location de vélo longue durée dans le Pays de Beaume Drobie, plan vélo du PNR du Livradois-Forez) ou des transports publics (emports des vélos dans les autocars, navettes autonomes en complémentarité du service ferroviaire). L’enjeu pour assurer la mobilité de tous est de parvenir à court / moyen terme à un déploiement large de services de mobilité, sur tous les territoires, à des coûts raisonnés.

S’il est nécessaire de proposer demain des services de mobilité alternatifs à la voiture sur l’ensemble des territoires, la garantie d’une mobilité pour tous passe aussi par une dimension sociale, car des publics sont empêchés dans leurs mobilités du fait de leur âge (notamment les jeunes et les séniors), de la faiblesse de leurs revenus, de difficultés à appréhender les codes permettant de se déplacer ou encore d’une situation de santé ou de handicap rendant la mobilité complexe. Pour répondre à ces défis, des initiatives de mobilité solidaire se multiplient, comme celles présentées ici au travers d’une Plate-forme Mobilité et d’une auto-école solidaire. Ces solutions permettent à des publics fragiles de trouver une autonomie dans leurs déplacements via la voiture (aide au permis de conduire, prêt de voiture) ou par d’autres biais (vélo-école, location de mobylette, accompagnement personnalisé pour les transports publics…).

Le développement de services itinérants (dont l’auto-école présentée dans ce rapport) constitue aussi une solution aux difficultés de mobilité. Ces services itinérants permettent en effet de répondre aux besoins d’alimentation, de santé, de culture et de loisirs des populations éloignées des commodités de la vie quotidienne.

Enfin l’une des vertus des politiques cyclables, fortement mis en avant dans ce recueil, est de contribuer à cet objectif d’inclusion en faisant la promotion d’un mode accessible au plus grand nombre, en autonomie et pour des coûts limités aussi bien pour l’achat du vélo que des frais d’usage ou encore des coûts pour la collectivité (création et entretien des équipements cyclables).

Rendre les mobilités plus faciles et agréables grâce à un bouquet d’offres diversifié :

La voiture est un outil de mobilité qui permet d’aller presque partout, rapidement (en l’absence d’embouteillage) et à n’importe quel moment de la journée. A ce jour, aucune alternative n’est en capacité à répondre à un panel aussi large d’attentes en termes de mobilités, mais la combinaison de certaines solutions (intermodalité) ou le recours en fonction des besoins à tel ou tel service (multimodalité) permet à de plus en plus de personnes de bouger autrement qu’en voiture.

Aujourd’hui, les solutions de mobilités alternatives à la voiture sont multiples et ce recueil en présente un certain nombre qui sont développées au sein du périmètre régional : vélos, trottinettes, transports publics (navettes autonomes, bus…), complémentarités entre cars et vélos ou encore les usages repensés de la voiture au travers du covoiturage ou l’autopartage.

De plus, pour accompagner une utilisation simplifiée et fluidifiée des différents modes de mobilité, la diffusion d’une information globale est indispensable. D’ailleurs, la Loi d’Orientation des Mobilités prévoit que, depuis fin 2021, les collectivités territoriales compétentes en matière de mobilité doivent déployer un service d’information à l’intention des usagers, portant sur l’ensemble des modes de déplacement sur leur territoire, de type Mobility as a Service (MaaS). Ce service permet dès lors aux usagers de se déplacer d’un point A à un point B, en lui proposant tous les moyens de transports organisés par la collectivité et l’ensemble des acteurs de la mobilité : marche à pied, vélo, bus, métro, autopartage, covoiturage, taxi, parking… Deux approches sont mises en avant dans le recueil et constituent des sources d’inspiration pour les collectivités qui doivent étendre l’information dans le domaine des mobilités :

  •  – L’une est développée par une PME régionale (application « My Bus »), qui s’appuie sur l’ouverture des données pour proposer à minima l’information voyageurs (itinéraire, horaires de passage…) de la plupart des réseaux de transports publics urbains et dans certains cas d’assurer la distribution de titres, voire de proposer les autres services de mobilité à disposition : vélo / trottinette en libre-service, parking… (solution MaaS retenue par l’agglomération de Mulhouse).

 

  •  – La deuxième initiative est celle proposée par l’opérateur « TAC mobilités », qui exploitent les services de mobilité de l’agglomération d’Annemasse. Cette entreprise a déployé un portail unique pour les mobilités de son territoire en associant aussi les services de mobilité de Genève. Ainsi, ce portail propose un bouquet de mobilités intégrant le RER, le tramway, le bus, le transport à la demande, la voiture, les parkings et le vélo.
Améliorer l’efficacité énergétique des transports et réduire les nuisances (gaz à effet de serre, bruit…)

La décarbonation des mobilités constitue également un enjeu fort au regard des aspects climat, santé, environnement, mais aussi par rapport à des aspects plus géostratégiques de moindre dépendance au pétrole, que la France est obligée d’importer.

Le premier levier est celui de l’innovation technologique en modifiant les motorisations des véhicules, pour diminuer les émissions dans les zones urbaines. Le mouvement d’électrification des mobilités s’accélère et concerne aussi bien la sphère du particulier (vélos et voitures électriques), que celle des entreprises de transport de voyageurs (du bus électrique au train à hydrogène), mais aussi de marchandises, où la livraison du dernier kilomètre fait appel à une nouvelle gamme de véhicules (vélos-cargo ou tri-porteurs électriques), en sus des camionnettes et camions, qui tendent à se convertir vers l’électrique ou le gaz. A titre illustratif, ce recueil met en avant diverses solutions autour du vélo électrique, du bus électrique à batterie, du trolleybus bi-mode (captage du courant par ligne aérienne + batterie pour franchir des zones non équipées) ou encore train à hydrogène.

Le deuxième levier est celui du changement de modes de déplacement, pour aller vers des usages moins consommateurs d’énergie. Au regard de l’importance des petits parcours (en France, 1 déplacement sur 2 fait moins de 5 km), Etat et Autorités Organisatrices de Mobilités visent et accompagnent le développement de la pratique du vélo, qui est à même de se substituer à la voiture sur bon nombre des courts trajets. Il en est de même sur la logistique du dernier kilomètre, où les livraisons par vélo-cargo peuvent se substituer à certaines tournées en camion / camionnette. De même, des outils informatifs comme les MaaS sont en capacité de donner une meilleure visibilité des alternatives à la voiture. Beaucoup d’initiatives présentées dans ce recueil s’inscrivent d’ailleurs dans l’incitation au changement de mode.

Enfin, le dernier volet touche à la promotion d’un aménagement des territoires, permettant de « réduire à la source » la distance et le nombre des déplacements. Ce point à la jointure entre politiques de mobilités et politique d’urbanisme est très structurant pour aller vers une société sobre en énergie au niveau des déplacements. L’outil E-mob présenté dans ce recueil s’inscrit pleinement dans cet objectif, via une simulation des conséquences sur les trajets (temps, coûts) en lien avec un projet résidentiel.

Ouvertures prospectives

Le déploiement massif des projets présentés dans ce recueil est à même de changer en profondeur dès l’horizon 2025 – 2030 l’appréhension des mobilités, en tournant le dos à une mobilité actuelle reposant sur une culture du déplacement sans limite, faisant la part belle à la voiture.

L’action la plus structurelle pour des mobilités vertueuses, aussi bien au regard des enjeux d’autonomie énergétique, d’environnement que d’inclusion sociale, est de parvenir à structurer des territoires de proximité (à l’échelle d’un quartier, d’une commune), dans lesquels les habitants peuvent trouver dans un univers proche une grande partie de leurs activités allant du travail (maximiser le télétravail ou le travail dans des tiers-lieux), aux courses comme aux activités culturelles et sportives. Cette action n’a pas pour but de réduire la mobilité (le fait de se déplacer), mais d’agir sur les distances de déplacement entre le domicile et les lieux d’activités (travail, école, achats…).

Cela passe par des actions portées par la collectivité sur l’organisation territoriale, la revitalisation des espaces de centralités mais aussi par une prise de conscience des ménages de l’intérêt à résider à proximité de lieux d’activités. De même, il convient que les acteurs économiques (re)pensent la localisation de leurs activités au plus près des bassins de population et d’un certain nombre de commodités, comme la restauration, les crèches ou encore les écoles.

Cette proximité améliorée pour bon nombre d’activités, le basculement massif en faveur des mobilités actives (marche, vélo, trottinette) peut s’enclencher, sous réserve que les infrastructures soient appropriées (trottoirs larges, pistes cyclables, stationnement vélo…). Sur les trajets à plus longue portée, la multiplication de solutions (du vélo électrique au train en passant par le covoiturage) pourrait sensiblement réduire l’usage de la voiture « solo ».

Enfin, le dernier chantier pour aller vers des mobilités vertueuses est de traiter les questions de motorisation des véhicules (du vélo au train en passant par la voiture), à la fois pour consommer moins (et donc moins émettre de pollution) et de moins dépendre des pays détenant les ressources pétrolières et gazières.

[1] Dreal / Cerema / Urba4 – Mobilités innovantes – recueil d’expériences sur les mobilités innovantes en Auvergne-Rhône-Alpes – 2022 – 56 pages

[2] Ce travail a été piloté par la DREAL Auvergne-Rhône-Alpes, en s’appuyant sur un groupement d’ingénierie publique associant le Cerema (Centre d’Études et d’expertise sur les Risques, l’Environnement, la Mobilité et l’Aménagement) et le réseau Urba4 constitué des agences d’urbanisme de Clermont-Ferrand, Grenoble, Lyon et Saint-Etienne. Ce groupe avait publié en 2019 un premier recueil présentant une trentaine d’initiatives innovantes en termes de mobilité.